Les Hommes sans Épaules


Dossier : JOYCE MANSOUR, tubéreuse enfant du conte oriental

Numéro 19
150 pages
Premier semestre 2005
17.00 €


Sommaire du numéro



Editorial : "La Poésie fait l'inventaire de l'ombre", par Christophe DAUPHIN

Les Porteurs de feu : Poèmes de Serge BRINDEAU, Vénus KHOURY-GHATA

Ainsi furent les Wah : Poèmes de Suzanne JARDON, Georges JEAN, Jean CHATARD, Janine MODLINGER, Cathy RAPIN, Cédric YOLE

Dossier : "JOYCE MANSOUR, tubéreuse enfant du conte oriental", par Marie-Laure MISSIR, Poèmes de Joyce MANSOUR, Georges HENEIN, André BRETON, Alain JOUFFROY, Jorge CAMACHO, Guy CABANEL, Alain JOUFFROY

La mémoire, la poésie: Henri FALAISE, par Paul FARELLIER, Poèmes de Henri FALAISE

La mémoire, la poésie : Ernest DELÈVE, par Jacques TAURAND

Une voix, une œuvre : Gérard MURAIL, par Michel PASSELERGUE

La Mémoire, la poésie : Max JACOB et Benjamin FONDANE à Drancy, ou deux poètes dans l'antichambre de la mort, par Karel HADEK, Poèmes de Max JACOB, Benjamin FONDANE

Avec la moelle des arbres : Notes de lecture de Jean CHATARD, Jacques TAURAND, Karel HADEK, Christophe DAUPHIN, Paul FARELLIER, Jean BRETON

Illustrations de Joyce MANSOUR

Présentation

LA POESIE FAIT L'INVENTAIRE DE L'OMBRE

(Extrait)

 

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Légende : Joyce Mansour : Objet méchant. Technique mixte. Collection privée. Tous droits réservés.

 

"... Jamais nous n'avons aussi peu regretté nos épaules, et nous vous souhaitons, tout comme nous, de les perdre au plus vite. Seuls le rêve et le feu du verbe nous maintiennent debouts. Nous accueillons aujourd'hui, deux beautés orientales; deux prêtresses du lyrisme; deux déesses de l'onirisme : Joyce Mansour et Vénus Khoury-Ghata. Nous avons choisi de consacrer notre dossier central à Joyce Mansour (dont six poèmes inédits ont paru dans notre numéro 17/18), parce qu'il faut viser sans cesse à l'élévation, à la perfection du désir; à la plus grande imprudence dans le désir, sans quoi il n'est point hauteur ni pureté dans la passion. Marie-Laure Missir, biographe de l'"étrange demoiselle", est l'auteur de ce dossier. La leçon de Mansour, selon nous, c'est qu'il faut risquer tout son être sensible et pensant, le vouer tout entier à la plénitude de l'acte; devancer sans cesse et provoquer son destin. N'a-t-elle pas elle-même répondu en 1965, à une journaliste qui l'interrogeait : « J’étais allée au cimetière pour un enterrement musulman. Soudain, une femme s’est mise à crier. Le cri est né, très grave, dans le ventre et il est peu à peu devenu aigu, fracassant ; il semblait surgir du haut du crâne, à cet endroit précis, vous savez, les fontanelles, d’où les religions disent parfois que l’âme s’échappe au moment de la mort. C’était terrifiant. Voilà la poésie. Moi j’écris comme cette femme s’est mise à crier », (in Entretien publié dans La Tribune de Lausanne, 7 novembre 1965). Joyce Mansour est un diamant noir qui brille très haut et très fort dans les abîmes de l'être. Rappelons également que la critique demeura perplexe à la parution de Cris, le premier livre de poèmes de Mansour, chez Seghers, en 1953. Le premier à en parler en France, et à être saisi par sa poésie, dont il détecta le génie, n'est autre que Jean Breton, qui écrivit : « Une égyptienne inconnue, Joyce Mansour, révèle dans « Cris », une personnalité curieuse, attachante et volcanique, je ne puis employer d’autres mots. Ses poèmes sont d’une violence qui donne à réfléchir, qui sidèrent, déroutent et souvent émeuvent. Car la mort, la volupté et tous les symboles du couple sont mêlés et saignent. La plupart de ces poèmes baignent dans une sensualité presque effroyable, sans héritage apparent, d’autres dans l’apaisement rageur », (in La Gazette Provençale du 25 février 1954). Parallèlement à la sortir de ce numéro 19 des Hommes sans Epaules, nous organisons, à la Librairie-Galerie Racine, une riche exposition Joyce Mansour: tableaux, objets méchants, livres, photographies et manuscrits... "

Christophe DAUPHIN

(Extrait de l'éditorial, Le Poète fait l'inventaire de l'ombre, in Les Hommes sans Epaules n°19, 2005).




J’écrirai des deux mains

Le jour que je me tairai

J’avancerai les genoux raides

La poitrine pleine de seins

Malade de silence rentré

Je crierai à plein ventre

Le jour que je mourrai

Pour ne pas me renverser quand tes mains me devineront


Nue dans la terre brûlante

Je m’étranglerai à deux mains

Quand ton ombre me lèchera

Ecartelée dans ma tombe où brillent des champignons


Je me prendrai à deux mains

Pour ne pas m’égoutter dans le silence de la grotte

Pour ne pas être esclave de mon amour démesuré

Et mon âme s’apaisera

Nue dans mon corps plaisant


Joyce MANSOUR

(in Les Hommes sans Epaules n°19, 2005).



Revue de presse

2005 - À propos du numéro 19

    « L’arbre du monde est une femme : Joyce Mansour. Ah ! Fulgurante Joyce Mansour, on était depuis toujours amoureux d’elle et maintenant on la découvre belle en photo dans le n°19 des Hommes sans Épaules. Un dossier (biographique et historique) de 45 pages concocté par Marie-Laure Missir sur cette Egyptienne de feu. Dans ce même numéro un dossier sur Henri Falaise, et un plus bref sur Gérard Murail. »
    Christian Degoutte (Verso n°122, septembre 2005).