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12 décembre 2013 Dans Rimbaud revue

"Auteur de quelques vingt-sept ouvrages de poésie, prose poétiques ou souvenirs publiés depuis un quart de siècle, Jacques Simonomis n’attendait qu’un commentateur pour que son œuvre connaisse vraiment le rayonnement auquel ses qualités humaines la destinaient. C’est maintenant chose faite par la grâce d’un Christophe Dauphin particulièrement bien inspiré, qui analyse, ausculte une par une et dans tous les domaines les qualités et l’évolution d’un langage haut en couleur, chargé de tendresse humaine et d’authentique révolte face au monde que nous connaissons. Simonomis le sensible nous apparaît plus accessible encore, à travers Sa vérité qui n’est pas celle de tous, son rythme de poète qui casse et brise les tabous, son humour, parfois grinçant, qui met au pilori et les hommes et leurs œuvres, sans oublier le fondateur et l’animateur depuis une bonne décennie du fameux Cri d’os, ouvert à toute œuvre de qualité… Complété par de larges extraits de l’œuvre de Simonomis, cet ouvrage est un tout qu’on ne peut négliger lorsqu’on se penche sur l’œuvre du fondateur du Cri d’os."

Jehan Despert (Rimbaud Revue n°27, 2002).




Critique


Pour les amoureux décadents des Doors, voici un essai de plus sur le parcours de vie de Jim Morrison. Et pourtant non… Ce qui fait la force exceptionnelle de ce livre de Christophe Dauphin, c’est d’avoir su mettre en lumière l’originalité de l’œuvre poétique de Jim et la complexité du personnage. C’est vrai, et Dauphin l’écrit fort justement, l’œuvre de Morrison « dépasse le cadre des clichés du pantalon moulant de cuir noir ou de la beuverie, pour atteindre et canaliser l’essence même de la vie : la poésie, par-delà le visage d’ange et la réputation sulfureuse ». Morrison et Rimbaud, dans l’éternité, doivent s’entendre.

 

Jean-Luc Maxence (Les Cahiers du Sens, 2002).




Lectures critiques :

Déesse facile par la rose et la ruse

Surgie fendue d’entre les songes

entre tes seins et moi tous les pilleurs d’épaves

C’est toi la femme qu’un nécromant sortit

de sa cornue

durant l’émeute des oiseaux

J’appréciai sur ma peau tes couchers de soleil

Je n’ai aimé que toi puis j’ai brûlé les draps

 

Chaque recueil de poèmes d’Alain Breton étonne et détonne sans effacer un sentiment intime de familiarité. L’explosion des mots, non sans sagesse, révèle des alliances insoupçonnées.

 

Donc j’ai fait civilisation

j’ai fait beauté au seul défaut de l’herbe

j’ai fait rêves pour enrayer la pourriture

j’ai fait splendeur et bassesse

j’ai fait soleil mystérieux de ma face

j’ai fait éternité de mon absence

 

mais je n’ai pas trahi

 

Tout peut être dit suggère Alain Breton. Encore faut-il connaître la symphonie des mots pour en faire une fête salvatrice, non qu’il y ait quoi que ce soit à sauver de personnel mais la beauté, la liberté, l’amour… des puissances sans doute éternelles en soi, indépendantes de ce qu’en font les êtres humains avec leur expression sans cesse contestée.

 

En libérant les mots et les sons du carcan des préjugés et conditionnements, c’est l’espace même de l’être qui se désencombre. De nouveaux mondes apparaissent. Ils sont internes, externes, ni l’un ni l’autre. Le défi ultime, celui qui nous réintègre à notre propre nature, appelle la restauration d’un rapport secret au son, au mot, à la langue pour abolir les temps ou jouer avec, suspendre les causalités trop linéaires, choisir les tourbillons qui en leur centre préservent un lieu exquis.

 

Pendant qu’allaient et venaient

les Bönpos du mont Kailash

j’ai laissé quelques transes

chez les poneys des steppes

négligé des saillies pour la part du Diable

 

 

Compagnon des corsaires

j’ai capturé des îles fraîches

pleines de nèfles et d’oiseaux

chanté sous des nuages splendides

près des cercles respirants d’Asger Jo

nagé aussi dans l’eau de Lyre

en piétinant les herbes récitées

et demandé l’hospitalité au lièvre qui court

sans jamais s’arrêter

 

Beaucoup de poèmes apparemment réussis ne franchissent pas avec succès les lèvres. Dits sur scène, ils tombent lourdement au sol sans atteindre et réveiller les esprits de ceux qui entendent. Lire les textes d’Alain Breton à haute voix, donner vie aux images, permet de pénétrer des états nouveaux où la distinction entre le rêve et la réalité s’estompe.

 

Poètes je suis venu voir vos boiteries les miennes

les broderies dans vos douleurs

Le saviez-vous

je vis poète je mange poète je lis poète

Jadis j’ai été décoré des ordres

du rire et du sanglot

aussi de la rivière fabuleuse

des cris de plaisir de l’hirondelle

 

Rémi Boyer (in lettreducrocodile.over-blog.net, février 2024).




Lectures critiques :

« Tout est âme en toi quand je t’aime

 

par le tigre et la cornaline

 

Sur ta rivière décachetée

 

je suis le titulaire du philtre

 

Suspendu à l’Yggdrasil

 

tenu par le serment des mille respirations

 

quand par miracle

 

tu apparais

 

dans la chambre secrète

 

des lieux où je t’invente »

 

Ce poème d’Alain Breton rappelle tout ce que le mot asphodèle peut évoquer en nous : la mort, la liberté, la beauté, l’amour, la magie, le mystère… Mais, le recueil est parsemé d’inattendus, de détours, de sauts à l’aveugle, de cris de colère, et de gestes d’apaisement.

 

« Jadis nous surprit Orphée contrebandier de peaux et de tabac

 

Sa lyre réglait tout un empire

 

dont la règle fut le chant

 

et Eurydice celle qui n’applaudit pas

 

militante d’un club où l’on fait la vaisselle

 

à laquelle on ne confie pas le whisky

 

dans la cité maudite

 

ni l’or des Incas pour une brocante à la Jamaïque

 

ni les spectres qui jonglent avec les yeux des chats

 

cochers de l’irréel »

 

Alain Breton nous balade, nous conduit, nous perd et nous retrouve. Cache-cache des mots et splendeur du verbe qui, soudain, libère, parfois à contre-sens.

 

Odile Cohen-Abbas, dans sa postface, l’interpelle :

 

« Visions prospectives et apocalyptiques s’enchevêtrent que régénèrent toujours des indices ou fragments fictionnels du présent. Vous êtes si prodigue, Alain Breton, quand vous distribuez le vrai et le faux, le sordide et le beau, les songes des hommes qui prennent naissance dans les vieilles eaux, les antagonismes du désir, votre passion indissoluble de l’humour et de la tragédie ! »

 

Alain Breton épuise la langue pour en faire un creuset dans lequel la matière des mots peut assurer une résurrection, celle du poème, de l’éclair lumineux qui enchante par la lucidité. C’est terrible et jubilatoire.

 

« C’est toujours la même chose

 

sous les sphères

 

on remercie bien tard

 

le petit âne pour ses biscuits

 

et l’aigle qui a du lustre

 

Un peu prétentieux pourtant de ses serres

 

sait-il faire jouir au mieux sa compagne

 

en garde-t-il le goût dans ses rondes

 

quand il fait le malin dans le vent

 

ô grand-maître qui ne se pose que pour l’arbre

 

ou tuer »

 

La déambulation d’Alain Breton est une quête éperdue du passage étroit entre la mort et la vie, l’horreur et l’extase, entre le poème et le silence.

 

Rémi BOYER (in incoherism.wordpress.com, avril 2022).

*

Quand on court contre le temps on a toujours du retard dans ses lectures, ses écritures, et tout le reste… Mais au moins poser un parcours. Rendez-vous avec des livres…

 

Donc lire… Alain Breton

 

Premier recueil de poèmes de lui que je lis. Mais j’avais déjà découvert plusieurs de ses textes dans diverses anthologies (du Nouvel Athanor, notamment) et avoir l’intention d’en lire plus.

 

Intriguée par le titre, Je serai l’assassin des asphodèles, éd. Les Hommes sans Épaules, 2022

 

Elles sont assez belles ces fleurs, fréquentes en bords méditerranéens, les asphodèles. Mais la mort, c'est elles qui la marquent. Au moins dans la culture antique (et parfois encore comme par une mémoire culturelle inconsciente), fleurs pour orner les tombes. Les tuer serait-ce tuer la mort ? En acceptant que la poésie soit (comme le dit Roberto Juarroz, cité en exergue principal) une forme de folie qui nous préserve du bon sens et des stupides idoles qui dévorent la vie des hommes. Et ainsi... qui nous permet de vivre et de mourir en tant que nous-mêmes. Le sujet de la mort est bien là. Celle qui nous guette, celle qui environne, celle que la société veut éloigner, celle qu'en fantasme on se souvient d'avoir vécue, habitant l'histoire en personnage du passé, celle de l'image des Érinyes / dans chaque gare... Celle que les humains infligent ainsi que firent nos ancêtres (mais...). Mais, car le monde est autre, cruel autrement. Cependant s'il y a présence du tragique des vies, il y a, en contrepoint, l'art des oiseaux. Métaphore de plus de sens.

 

Parcours rapide. Mais assez pour grappiller des fragments, y revenir, et noter qu’il aime citer (j’ai lu et relu les autres exergues…). Assez aussi pour avoir senti l’esprit, comme un voyage intérieur, s’interrogeant sur les émotions qui donnent épaisseur à tout ce que l’on vit, et, en arrière-profondeur de pensée, regardant comme de haut tous ces instants, ces bribes d’itinéraire, cherchant le sens, et la liberté intérieure qui se construit avec et contre le temps. Mais, comme le dit en exergue Marie-Claire Bancquart, éclairant le poème qui suit, p.135 (Nulle route que vers le dedans), le voyage est intérieur, pour se demander où avoir eu lieu (p.170), et se définir en poète visiteur du cri (p.178)

 

Citations…

 

Un jour je parlerai de choses et d’autres

car je n’ai pas promis

 

(Ces deux vers, p.11, suivent le titre Comment édifier un précipice, et l’exergue d’Alain Simon, dont je copie la dernière ligne, je viens pour seulement les philtres). On a le programme intime de l'écriture, sans obligation, mais avec un risque pris, ce précipice dressé dont on peut tomber, mais si la poésie s'autorise une forme de folie (Roberto Juarroz), elle a sa magie, ses philtres (Alain Simon). Mais les philtres, c'est Alain Breton qui les crée. Et ils ont leur efficacité, comme le démontre la postface d'Odile Cohen-Abbas, car elle voit aussi la face lumineuse qui vient de ces créations voyageuses, de ces rêves dont l'amour n'est pas absent.

 

Qui suis-je

même pas le mangeur de ciel

 

Plutôt de la lignée des Poissons

une simple arête qui clame la jetée

et donne écriture aux planètes

(p.53)

 

J’ai vieilli je ne dépends plus que de mes souvenirs

et de l’herbe si lente après la nuit

(p.93)

 

Et je ne savais pas

que ma vie irait toujours au poème

pour ne surtout rien comprendre

sauf la magie

(p.136)

 

Marie-Claude SAN JUAN (in tramesnomades.hautetfort.com, 2022).




Dans la revue Autre Sud

"Jean Breton occupe une place particulière dans le panorama de la poésie française contemporaine depuis la publication de son manifeste (en collaboration avec Serge Brindeau), Poésie pour vivre, en 1964. Il y développait des idées proches de celles qu’exposera  plus tard Guy Chambelland, à savoir que la poésie ne doit pas se couper de l’homme ordinaire. Il proposait don un art de vivre et de penser en poésie dont la publication causa quelques remous. L’essai que Christophe Dauphin consacre à Jean Breton insiste évidemment sur ce point essentiel. Mais il ne s’y limite pas. Son propos est de suivre l’itinéraire du poète depuis ses premières armes à Avignon, sa ville natale, avec une part importante accordée à la période parisienne. C’est en effet le moment où sont fondées les éditions Saint-Germain-des-Prés et le cherche midi éditeur, celui où il crée, après Les Hommes sans Épaules, la revue Poésie 1, sur une idée originale promise à un succès étonnant. Les analyses sont entrecoupées d’entretiens de Jean Breton avec l’auteur qui donnent un regard rétrospectif et confirment les tendances les plus caractéristiques de son ouvre. Christophe Dauphin souligne le souci d’authenticité, la volonté d’établir entre la vie et l’œuvre un accord parfait… L’essai se termine par une partie anthologique de vers et proses, et d’une bibliographie précieuse pour qui veut découvrir Jean Breton."

Jean-Max Tixier (Autre Sud n°22, 2003).




Critiques

"A l’occasion du centenaire de la naissance de ce grand poète que fut Jean Rousselot (1913-2004), Christophe Dauphin a dressé un portrait riche et touchant de cet homme aux multiples talents dont le parcours complexe est un exemple de foi en l’humanité et d’engagement pour la liberté.

A propos de son enterrement, quelques jours après son décès le 23 mai 2004, Christophe Dauphin confie : « Nous venions d’enterrer soixante-dix ans de poésie française. Jean était la poésie, une poésie sans cesse aux prises avec la vie, le fatum et l’Histoire ; un homme d’action, qui a durablement marqué les personnes qui l’ont approché. ».

Ce fut Louis Parrot, son mentor, qui l’initia à la poésie contemporaine. Ils se rencontrent en 1929. Cette initiation dépasse le cadre de la poésie, il est question aussi de philosophie, de psychologie, de politique et de religion. Il fut, dit Jean Rousselot de Louis Parrot, « mes universités ». C’est à Poitiers, ses nuits, ses cafés, le quartier ouvrier où vit Rousselot, les campagnes environnantes, que le poète se forge, que le génie se fraie un passage dans une forêt hostile faite de préjugés, de combats intérieurs, d’un isolement, peut-être salutaire, mais seulement apparent : « Je ne suis jamais seul. Je ne suis jamais Un. Je me tourmente pour des douleurs qui tiennent éveillée, la nuit entière, la vieille repasseuse qui m’a nourri ; pour la soif qui calcine un soldat au ventre ouvert… La douleur, l’angoisse, l’exil et le danger, voilà mes chemins de communication, voilà mes adhérences au placenta du monde… »

Proche des Jeunesses socialistes, puis en 1934 de la Ligue communiste, anticolonialiste, ses combats politiques sont, à l’époque, proches de ceux des surréalistes. Mais son combat politique reste distinct de sa poésie. En 1932, il participe à l’aventure de la revue bordelaise Jeunesse à la recherche d’un « renouvellement », d’un « rafraîchissement » de la poésie. C’est à partir de la publication en 1936 d’un recueil, intitulé Le Goût du pain, que Jean Rousselot est considéré comme un acteur essentiel de ce renouveau de la poésie.

Quand la guerre arrive, Jean Rousselot se sert de sa fonction de Commissaire de Police pour aider la Résistance et les poètes en danger. Sa poésie devient une poésie de combat, notamment dans cette « école » qui rassembla René Guy Cadou, Jean Bouhier, Michel Manoll, Marcel Béalu et d’autres. Une école, une manifestation de l’amitié.

Poète et homme d’action André Marissel parlera à propos de Jean Rousselot de « surréalisme en action ». Jean Rousselot gardera un grand respect pour le surréalisme qui l’aura éveillé, lui comme ses compagnons, et revendique une continuité entre les surréalistes et lui, tout particulièrement par une collaboration avec l’inconscient.

Après la deuxième guerre mondiale, Jean Rousselot tourne le dos à une vie sociale et poétique facile construite sur la reconnaissance de son action exemplaire pendant le conflit. Il renonce à son métier et veut vivre de sa plume ce qui se révèle évidemment aléatoire. En 1996, tout en affirmant ne pas regretter son choix, il confie à Christophe Dauphin : « Ne lâche jamais ton métier, tu m’entends ! Jamais ! Ne fais pas cette connerie ! Tu pourras ainsi écrire quand tu veux et surtout, ce que tu veux. ».

Jean Rousselot écrira de nombreux articles pour la presse. Le premier est consacré au désastre de Hiroshima qu’il qualifie de génocide, ce qui le brouille avec Aragon. Il va désormais écrire beaucoup, une trentaine de plaquettes et livres jusqu’en 1973, une vingtaine de pièces pour la radio, des romans, mais découvrir aussi et faire découvrir de nombreux poètes talentueux. Tombé amoureux de la Hongrie, il dénoncera le drame de Budapest en 1956, condamnant violemment la contre-révolution russe, et traduira beaucoup de grands poètes hongrois en français comme Attila József, Sándor Petőfi, Endre Ady…

De 1997 à sa disparition, Jean Rousselot continue d’écrire et de publier une « poésie de terrain », au plus proche de la vie, du peuple, des rêves de liberté de tous ceux qui sont contraints. Une écriture de plus en plus dépouillée, directe, grave, sans mensonge, sans artifice, sans effet.

Jean Rousselot, au bout de 137 volumes, continue d’œuvrer. « Les mots de Rousselot restent debout et marchent à nos côtés. Le poète rend la vie possible. C’est pour cela qu’il ne meurt pas tout à fait. » dit avec justesse Christophe Dauphin."

Rémi BOYER (in incoherism.wordpress.com, 19 janvier 2014).

"Jean Rousselot aurait eu 100 ans le 27 octobre 2013. C’est l’occasion choisie par son ami, Christophe Dauphin, pour faire paraître cet essai qui nous dit ce qu’est et ce que doit être un poète : celui qui évoque le quotidien, homme parmi les hommes, travailleur parmi les travailleurs, qui, pour eux, fait le don de soi au sens le plus fraternel du mot.

« Ecolier » de Rochefort, proche de Cadou, Manoll ou Bérimont, admirateur fervent de Roger Toulouse, Jean Rousselot laisse une œuvre ample et diverse : l’œuvre d’un romancier, d’un historien, d’un critique aussi, amoureux de la parole, de l’écriture, et de l’émotion que l’une et l’autre procurent, et qui s’appelle poésie. « Le poème est pour moi l’inouïe prise de conscience des pouvoirs du poète sur le temps, qu’il arrête, sur la mémoire, qu’il ressuscite, sur les sentiments, qu’il élève au Sublime, sur le réel, qu’il perce et transmue pour en retrouver l’essence et a pérennité. »

Abel MOITTIE (in roger-toulouse.com, janvier 2014).

"Les analyses de Dauphin, comme d'habitude chez lui, cernent mieux qu'un portrait le personnage réputé impossible, mais il le transforme délibérément. Par exemple, ce qui n'était pas toujours mentionné dans les biographies, le rôle du poète dans la police et dans la résistance à l'occupant nazi est mis en evidence. Lorsqu'il eut quarante ans, Jean Rousselot parla du surréalisme en souriant de se croire un peu "plus surréaliste que les surréalistes eux-mêmes". Sa décision en 1946 de démissionner de tout et de vivre de sa plume fut capitale. Il devient alors grand voyageur et se produit et publie dans le monde entier. Il n'hésite pas non plus à prendre des positions fermes contre les injustices, comme pour Abdellatif Laâbi en 1972. Pour la forme de ses poèmes, il aura adopté tout. Avec force. Il s'insurge encore contre les inutiles: "Pour beaucoup de mes confrères, l'activité poétique consiste à fabriquer des objets de langage avec un langage sans objet... La poésie jetable gagne du terrain." Que n'aurait-il pas dit aujourd'hui ?"

Paul VAN MELLE (in Inédit Nouveau n°267, La Hulpe, Belgique, mars 2014).

"Jean Rousselot aurait eu cent ans en 2013. Et Christophe Dauphin a eu la bonne idée de faire à la fois sa biographie et un essai sur ce poète hors pair. Il divise son livre par chapitre chronologiques, et avec Jean Rousselot, c'est tout le vingtième siècle qu'on revisite... Christophe Dauphin insiste sur le fait que pour le poète, la poésie est surtout une manière d'être. L'homme est derrière son regard - Comme derrière une vitrine - Lavée à grande eau par le jour. Jean Rousselot prône une poésie de terrain et non de laboratoire ajoute l'auteur de la monographie. Je n'ai fait ici que survoler ce livre bien documenté. Ce qui étonne et retient chez Jean Rousselot, c'est la fidélité à ses idées et la rectitude de ses principes et de son action. Cela a toujours conféré à sa poésie une considérable autorité."

Jacques MORIN (in Décharge n°161, mars 2014).

"Le pari de Dauphin – restituer l’une des figures les plus emblématiques de la poésie francophone des années 30/80, à l’occasion du centenaire de sa naissance – est magnifiquement tenu par un autre passeur de poésie, rompu à l’exercice d’analyse et d’admiration d’un aîné qui a compté, qu’il a connu, avec lequel il a pu s’entretenir, avec lequel il a échangé nombre de correspondances.
Et le réseau se poursuit fidèlement : Jean Rousselot, qui a toujours revendiqué ses dettes envers Reverdy, Max Jacob, qui a toujours fait de l’amitié une vertu humaniste et littéraire, passe ainsi le relais à son  cadet de l’Académie Mallarmé pour qu’il chante (le mot n’est pas outré) un parcours poétique, celui d’un homme droit, qui s’est toujours voulu, comme il l’a énoncé dans ce beau poème (repris en fin de volume)  homme au sens le plus dense du terme: « Je parle droit, je parle net, je suis un homme. » Il est, certes, difficile de rappeler sans tomber dans les poncifs de la biographie et dans ceux de la vénération poétique. Christophe Dauphin, se basant sur une documentation de premier ordre, des témoignages de première main, des entretiens, de nombreuses lectures, une connaissance intime de la foison d’œuvres nées entre 1935 et 2002, rameute les grandes étapes de la formation d’un esprit, d’une conscience littéraire. L’occasion d’un tournage pour la télévision, sous l’impulsion du poète-maire Roland Nadaus, souda le poète des « Moyens d’existence » et son jeune biographe.  Le centenaire fêté à Saint-Quentin-en-Yvelines en 2013.

"Le 23 mai 2014, il y aura dix ans que l’écrivain Rousselot nous a quittés.
Le petit livre de Dauphin, qu’on lit d’une traite tant il respire le respect et le travail en profondeur pour nous faire mieux sentir une voix vraie, agrémenté de photographies (portraits de Rousselot et des groupes d’amis poètes) et d’une belle huile en 4e de couverture due à l’ami peintre Roger Toulouse, offre, en quatre sections chronologiques, une étude précise de soixante-dix ans dévolus à la poésie. Les origines ouvrières, le sens aigu du social et du juste, la lutte contre la tuberculose, les rencontres fondamentales des poètes Fombeure et Parrot, l’ancrage de Poitiers (la province enfin !) et l’effervescence intellectuelle de cette cité natale, une première revue créée (Le Dernier carré), la reconnaissance dès 1936 (avec « Le goût du pain »), le commissaire Rousselot résistant de la première heure (que de tâches et de faux papiers à prévoir !), l’intense expérience de Rochefort-sur-Loire (dont Rousselot est redevable, mais dont la seule mention finira un jour par l’agacer comme si c’était son seul ancrage), les travaux « alimentaires » dès qu’il cesse ses activités de commissaire pour se consacrer uniquement à la littérature…les matières sont multiples et le travail de Dauphin donne poids, relief, consistance à tous les trajets accomplis par le poète entre sens incisif d’une poésie à hauteur d’homme et conscience aussi précise de son devoir d’homme, de poète, d’écrivain solidaire, syndicaliste et engagé dans les mille et une tâches d’écriture poétique, critique, romanesque et de traduction.

Les solidarités littéraires s’inscrivent en grand dans cette perspective : les aînés salués (Reverdy, Jacob, Jouve en tête), les cadets mis à l’honneur (Cadou), les actions multiples dans les journaux et revues (jusqu’à Oran) pour défendre la poésie. Rousselot (que je comparerais volontiers à l’infatigable Armand Guibert, que Christophe ne cite pas) n’a jamais oublié d’être, en dépit de ses cent quarante volumes, en dépit des reconnaissances ; il méritait cette approche soignée.

Que retenir de plus frappant ? Tant de faits, tant de poèmes, tant de gestes ! Allez, sélectionnons : ses coups de gueule au moment où tout le monde se taisait lors des événements de Budapest (ah ! ses amis hongrois, Joszef, Gara, Illyés…) ; sa défense d’Abdellatif Laâbi des geôles hassaniennes ; sa défense d’une poésie de terrain (non de laboratoire)…. Mais, surtout, l’écriture d’une conscience. Et la fidélité souveraine à ses origines : « Et je suis seul à voir pendre derrière moi, - Comme des reines arrachées, -
Les rues de mon enfance pauvre », (« Pour Flora et Gyula Illyés », Jean Rousselot).

Un très bel essai de Christophe Dauphin !"

Philippe LEUCKX (in recoursaupoeme.fr, 11 juin 2014).

"Un remarquable essai de Christophe Dauphin, qui nous fait découvrir le parcours atypique de ce grand poète que fut Jean Rousselot. Ce grand admirateur de Victor Hugo, dont les premiers poèmes portent l'indéniable empreinte du maître, trace un chemin qui nous mène là où il écrit : Malgré moi j'ai pitié des cours profondes et visqueuses - sans oiseaux, sans feuilles tourbillonnantes - Et du pétrin invisible qui geint en bas - Jour et nuit comme un forçat enterré. Ce livre retrace l'itinéraire fondateur d'un poète portant la marque de l'inconscient et l'esprit libertaire, qui ne triche pas avec lui-même, et sur lequel bien d'entre nous feraient bien de méditer: descends vers les gouffres, dit-il, perds ta couleur, tes yeux et le dernier écho, là-haut, de ta présence..."

Bruno GENESTE (in revue Spered Gouez n°20, octobre 2014).




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