Jan Erik VOLD

Jan Erik VOLD



Figure de proue du modernisme poétique en Norvège, Jan Erik Vold est né à Oslo en 1939 et vit à Stockholm. Remarqué dès ses débuts en 1964 par Tarjei Vesaas, Vold s’est ouvert très tôt au jazz et à la poésie de la Beat Generation, et à été amené par la musique à la littérature. Plusieurs séjours aux Etats-Unis firent de lui l’introducteur de Willima Carlos Williams, Kerouac, Ginsberg, Ferlinghetti, puis de Robert Bly et de Bob Dylan en Norvège. Cet « enfant terrible » de la littérature norvégienne des années soixante-dix devint, dès ses premiers recueils de poèmes et à cause de prises de position fréquemment radicales, le symbole d’une profonde mutation de l’expression poétique dans son pays. Volontiers mordant dans ses attaques littéraires, resté libre de tout carcan idéologique, Vold cherchait à provoquer le débat et s’imposa ainsi comme porte-parole de toute une génération. Un aspect majeur des activités de cette époque reste la fondation ou la reprise de revues littéraires souvent polémiques, comme Profil, Vinduet (avec Kjell Hegelund) et Basar (avec Einar Økland). Responsable d’une collection littéarire où furent présentés Wolf Biermann et Robert Creeley, traducteur de Samuel Beckett, journaliste, auteur d’anthologies, Vold est depuis au centre de tous les débats. D’innombrables tournées lui ont permis d’amener ses lectures publiques à une perfection absolue grâce à la complicité de musiciens de jazz de grande notoriété : Jan Gabarek, Egil Kasatd, Red Mitchell, Chet Baker… Auteur de plus de vingt recueils de poésie et de prose, Jan Erik Vold a opéré, dès son troisième volume Hekt, la fusion d’un concrétisme formel et minimaliste et d’une nouvelle simplicité caractérisée par une absence presque totale de métaphores. On ne retrouve aucune des images classiques du modernisme dans ces poèmes  porteurs d’une intensité souvent onirique, d’un ton parfois halluciné. L’accueil glacial que la critique réserva à Hekt – un poème de ce recueil fut même lu lors d’une séance du parlement norvégien comme exemple de la dégénérescence poétique – reflète en partie le climat culturel de l’époque et le srévoltes qu’il engendra. Avec Mor Godhjertas glade versjon. Ja (La Version joyeuse de Mère Boncoeur. Oui, 1968), Vold rencontra le plus grand succès populaire enregistré en poésie depuis les années quarante. Le poète quittait ici le domaine de l’expérimentation concrétiste, la fable et le jeu typographique, pour faire jaillir les paradoxes en de longs poèmes incantatoires : un livre de poèmes-fleuves sensuels et non dénués d’humour. Le langage, ce sont des trous dans le silence. Mais le silence ne pourra jamais être entièrement percé de trous, a écrit Vold, qui a opté pour une forme à la fois épurée et repliée sur elle-même, qui mêle des concrétions vertigineuses à un réalisme du quotidien proche d’un Hauge. Ses prises de position défraient toujours la chronique : refus du progrès pour le progrès, dénonciation des comportements politiques et des absurdités socio-économiques (« la Norvège est un affreux petit pays peuplé de lâches »), dans le sens d’une préservation d’un environnement sérieusement menacé en Norvège. A lire : La Norvège est plus petite qu’on le pense, traduit du norvégien par Jacques Outin, (Castor Astral/Le Noroît, 1991).

Jacques OUTIN

 



Publié(e) dans la revue Les Hommes sans épaules


 
Dossier : POÈTES NORVÉGIENS CONTEMPORAINS n° 35