Cecilia MEIRELES

Cecilia MEIRELES



Cecília Benevides de Carvalho Meireles (Rio de Janeiro, RJ, 1901 - 1964) est née dans le quartier de Tijuca, à Rio de Janeiro. Avant la naissance de Cecília, sa mère avait perdu trois enfants : Carlos, Vítor et Carmem. Son père décède trois mois avant qu’elle ne naisse. Alors qu’elle n’a que trois ans, sa mère décède à son tour et Cecília est recueillie par sa grand-mère maternelle, Jacinta Garcia Benevides, une Portugaise née sur l’île de São Miguel, aux Açores. Celle-ci l’élève avec l’aide de Pedrina, une gouvernante qui raconte à Cecília contes et histoires. Cecília commence à écrire de la poésie dès l’âge de 9 ans. Elle montre également un intérêt pour la musique et étudie le chant, le violon et la guitare au Conservatoire National de Musique.

En 1919, elle commence une carrière d’enseignante. Préoccupée par la qualité de l’enseignement et la rareté des manuels, elle écrit des livres pour les écoles primaires. La même année, elle publie son premier recueil de poésie, Espectros, « Spectres », qui contient dix-sept sonnets sur des thèmes historiques, légendaires, mythologiques et religieux. En 1922, elle se marie avec l’artiste plasticien portugais Fernando Correia Dias avec qui elle aura trois filles. En 1923, elle publie Nunca mais, « Plus jamais » (1923) et Poema dos Poemas, « Poème des poèmes » (1923), qui contient vingt et un poèmes et six sonnets de caractère symboliste illustrés par son mari.

En 1925, elle publie Baladas para El-Rei, « Ballades pour le Roi » Ces trois volumes de poésie se rattachent au « symbolisme tardif », un mouvement littéraire dirigé par Tasso da Silveira. En 1935, Fernando Correia Dias se suicide à la suite d’une dépression. Cecília Meireles se remarie en 1940 au professeur et ingénieur agronome Heitor Vinícius da Silveira Grilo. Elle participe à la fin des années 1930, au Portugal, à plusieurs conférences sur la littérature brésilienne. Durant cette même période, elle prend part activement à la rédaction du journal A Manhã et du magazine Observador Econômico. En 1939, elle publie Viagem, « Voyage ». De fait, elle voyage beaucoup dans les années 1940, notamment aux États-Unis, en Uruguay, au Mexique, en Argentine et au Chili. Elle publie Vaga música, « Vague musique » en 1942 et Mar absoluto, « Mer absolue » en 1945. Le ton intime et la sonorité des versets demeurent, mais la langue et certains vers libres les rapprochent du modernisme littéraire, qui se fera plus présent encore dans Retrato natural, « Portrait naturel » (1949), Doze noturnos de Holanda e O aeronauta, « Douze nocturnes de Hollande et l’aéronaute » (1952), Romanceiro[1] da Inconfidência[2], « Romance de la Conjuration » (1953) et Solombra (1963).

L’activité de Cecília Meireles s’est exprimée aussi dans des domaines comme la pédagogie, la peinture et la traduction. Elle est l’une des fondatrices du mouvement Escola Nova, « École Nouvelle ». En 1924, elle publie son premier livre pour enfants Criança, Meu Amor, « Enfant, mon Amour », adopté par la Direction générale de l’Instruction publique du District Fédéral et approuvé par le Conseil supérieur de l’éducation des États de Minas Gerais et Pernambouc).

En 1934, elle crée avec son mari Fernando Dias le Centre de Culture Infantile, une bibliothèque pour enfants, qui sera fermé en 1937 par le régime de Getúlio Vargas du fait de la présence d’ouvrages jugés subversifs comme « Les Aventures de Tom Sawyer », de Mark Twain... Peintre, elle fixe les rythmes de la samba et de la macumba à travers des dessins et aquarelles. Dominant plusieurs langues (y compris le sanskrit et le hindi), elle traduit Rabindranath Tagore, Federico García Lorca, Virginia Woolf, Alexandre Pouchkine et Rainer Maria Rilke. Mais Cecília Meireles est surtout considérée comme l’une des poétesses les plus importantes de la langue portugaise et l’un des grands noms du modernisme brésilien. Son écriture, intuitive, cherchant à comprendre le monde à partir de ses propres expériences, est dominée par une forte suggestivité sensorielle. La fréquente apparition d’éléments comme le vent, la mer, le temps, l’espace et la musique confère à sa poésie un caractère fluide et éthéré et une certaine « rationalité magique ». Sur le plan thématique, on note la prédominance d’une réflexion philosophique sur la fugacité du monde, l’infini, l’amour, le temps et la nature. L’auteure aborde également le thème de la création poétique, presque toujours associée à la recherche de l’éternisation de la beauté, toujours éphémère, fugace (« La notion ou le sentiment de la fugacité de tout est le fondement même de ma personnalité »).

Cecília Meireles a défini comme suit son objectif en tant que poétesse : « Réveiller la créature humaine de ce type de somnambulisme dans lequel tant de personnes se laissent entraîner. Leur montrer la vie en profondeur. Sans prétention philosophique ni salut, mais par une contemplation poétique affectueuse et participante ».

Oleg ALMEIDA et Philippe MONNEVEUX

(Revue Les Hommes sans Epaules).


[1] Le Romancero (en castillan et aragonais) ou Romanceiro (en portugais et galicien) est un recueil de courts poèmes, nommés romances, anonymes, largement influencés par la religion, la guerre et l’amour, et transmis par tradition orale jusqu’au 19e siècle, période à laquelle ils commencent à être compilés par Agustín Durán en Espagne et par Almeida Garrett au Portugal.

[2] L’Inconfidência Mineira, révolte qui eut lieu en 1789 dans la capitainerie du Minas Gerais contre les excès fiscaux et l’exploitation à outrance des richesses naturelles de la colonie par la métropole, au détriment des colons portugais nés ou installés sur place. Elle fut durement réprimée par la Couronne Portugaise.



Publié(e) dans la revue Les Hommes sans épaules


 
DOSSIER : La poésie brésilienne, des modernistes à nos jours n° 49