Robert Rius, poète surréaliste

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Robert Rius, poète surréaliste

Robert RIUS

Livre épuisé

ISBN : 9782243044522
84 pages - 20.5 x 13.5 cm

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Le premier numéro des Cahiers Robert Rius, rassemble la totalité des derniers écrits consacrés à celui qui fut le poète surréaliste par excellence, et un membre fondateur du groupe La Main à plume, durant l’occupation. Ce volume, illustré par des documents inédits, contient des textes de Jacques Quéralt, Olivier Bot, Rose-Hélène Iché, Catherine Prade et des poèmes de Robert Rius et de Christophe Dauphin. Robert Rius fut un homme d'engagement, un critique d'art, un théoricien, un historien et un photographe. Après s'être destiné à la peinture, il en devint "un simple passionné", collectionnant et soutenant ses amis peintres. Autres de ses passions connues : les livres rares et les insectes. Les témoins de cette époque évoquent, tous, ses différents appartements comme des lieux extraordinaires, aux murs couverts de bibliothèques, de peintures (Tanguy, Matta, Brauner, Picasso ou Ernst) ou de série de Papillons. Homme chaleureux, il accueillait sans réserve et donnait sans compter. Inventeur avec Benjamin Péret, André Breton et Remedios Varo, vers 1937, du jeu surréaliste dit du dessin communiqué, il fut également un grand adepte de l'humour noir et aida André Breton, à faire connaître ou redécouvrir bon nombre d'écrivains cultes  lors de la préparation de la fameuse Anthologie de l’humour noir. Souvent considéré comme "le secrétaire" du Groupe Surréaliste d’avant-guerre, ou celui d'André Breton, son parcours, bien qu'original et singulier, fut constamment occulté par l'anecdote et par sa fin tragique. D'un grand poète, d'un homme cultivé et brillant, on a fait un mort, un fusillé de Fontainebleau, torturé et exécuté par les nazis presque par hasard. Il fallait étudier les traces de sa vie (et les archives de la Résistance) pour s'apercevoir que le hasard n'avait pas grand-chose à voir avec ce destin fauché brutalement en pleine jeunesse.




LAME SOURDE



L’espace des voûtes oxygénées
se poursuit
au réveil des objets
Cette poignée de fenêtre
est une arme pendue au plafond
comme les trottoirs et les mayonnaises
sont anonymes
J’aspire aux routes du sommeil
Avec  la fleur et toute la vie d’un homme

Un dé court parallèlement
aux oiseaux des rues
jusqu’à ce que le soleil vieillissant
tourne sept fois la langue dans sa bouche avant de parler

Le nuage poursuit toujours mon désir
au fil des œufs
j’ai erré tout un sommeil
autour d’arbres renversés
leur chair a tracé leur vie
à l’encre de lune

Ma paupière est fermée
aux cheveux des moulins à vent


Robert RIUS


(Poème extrait de Robert Rius, poète surréaliste (AMRR, Les Hommes sans Epaules, 2010).


PIERRE EN RUPTURE D’ECHO


    à Laurence Iché et Monique Laguens.

Je n’ai rien écrit à Collioure ce 25 février
bien que l’azur y soit plus beau que sa légende

Les mots sont des morsures
mes mains hors de toi

J’ai regardé les galets boire la mer
j’ai arraché la nuit en rupture de regards

J’ai pensé à Rius
mon beau catalan aux paupières de trente ans

Je suis la baignoire de sable
identique aux brouillards d’été
la nuit où tout s’émiette
la chaleur m’enveloppe

J’ai pensé à Robert j’ai pensé à Marc
mes frères que l’on a recouverts de boue
dans les veines du matin d’hier d’aujourd’hui de demain
Et j’ai déchiré le sommeil dans le rêve

J'ai vu le ciel dans une étoile et le feu noir au cœur de l'arbre
la neige nue comme une femme
et le sang couché sur le sable

J’ai pensé à vous
des cris crachés comme des flammes
des soleils de révolte et d’amour aussi
un corps enroule la vie

J’ai pensé à Don Antonio
à la douleur creusée à son pas
sur la place du village

J’ai pensé à vos trois regards
noués comme une rivière qui coule dans les pierres
aux grandes orgues de la pluie qui ornent la mort
dans le revers du paysage

J’ai pensé comme Ramon Llull
qu’il faut d’abord sortir de soi
pour se mettre sur le chemin de l’autre.


Christophe DAUPHIN


(Poème extrait de Robert Rius, poète surréaliste (Cahiers Robert Rius n°1, 2010).


Sur Remue.net

"De temps en temps, dans la trop lointaine galaxie du surréalisme, une étoile filante apparaît ; alors, il faut vite saisir le sillage qu’elle laisse dans l’ombre ou la suie ambiante. Robert Rius, né le 25 février 1914, est mort le 21 juillet 1944, fusillé par les nazis pour faits de résistance : il vécut ainsi seulement trente ans, d’une guerre à l’autre. Il demeure l’inventeur en 1937, avec Benjamin Péret et André Breton, du jeu « le dessin communiqué ». Pour la préparation de l’Anthologie de l’humour noir (publiée en 1939, réimprimée en 1947, édition définitive en 1966 par Jean-Jacques Pauvert), il aida André Breton à sélectionner quelques-uns des écrivains qui y figurent de belle manière. Robert Rius aimait la littérature, la peinture, la photographie. Il lança la revue La Main à la plume en 1941, écrivit notamment l’Essai d’un dictionnaire exact de la langue française en 1943 (Editions Les Cahiers de Poésie) et un Picasso en janvier 1944 (Pages libres de La Main à la plume, édition clandestine). On peut lire, sur le site que vient d’ouvrir l’Association qui se consacre à la mémoire de Robert Rius, un tract adressé à Léon-Paul Fargue le 28 mars 1943 - impeccable traité du style en abrégé."

Dominique Hasselmann (Remue.net, 24 octobre 2006).