Roger-Arnould RIVIERE

Roger-Arnould RIVIERE



Roger-Arnould Rivière est né le 21 mars 1930 à Tarare (Rhône). Il accomplit ses études supérieures de lettres modernes, puis d’anglais, à la faculté de Lyon. Il écrit ses premiers poèmes en 1946, sous l’influence de Rimbaud, de Cummings et de Dylan Thomas. Avec Raymond Busquet et quelques autres, Rivière tisse une solide amitié.

Bien qu’il se décrive alors comme un jeune homme tout criblé de lumière, Rivière est confronté à la vie et à l’amour qui se refusent. Il a la prescience de ce mal de vivre qui le mènera à sa perte. Pour lui, la poésie est bien ce grand mouvement de sève comme en sont peuplées les saisons. Au fond de Rivière, il y a cette cassure profonde qu’il tente d’apaiser par l’écriture, l’aigu de la vie saisissant l’au-delà toujours progressif de l’être.

En 1955, Rivière se marie avec une jeune angliciste. Rivière s’engage en politique et participe à Roanne aux élections législatives sur une liste d’Union de la gauche socialiste. Toujours en 1955, il obtient le CAPES d’anglais, ce qui lui permet d’enseigner cette langue au collège de Tarare puis au lycée Ampère, à Lyon, ville où il s’installe.

Le 16 septembre 1959, soit le lendemain de la rentrée scolaire, le poète se suicide au gaz à son domicile, 91 montée de l’Observance, laissant un ultime poème, dont le dernier vers est pour le moins cinglant : J’ai vécu pour savoir et je n’ai pas su vivre. Les poèmes de Rivière (qu’André Breton fut l’un des rares à commenter : « Du premier au dernier ces poèmes sont admirables ») expriment avant tout la déchirure.

Entre la nostalgie d’une plénitude et le pressentiment de la destruction, un homme interroge avec anxiété un monde déjà brisé, indéchiffrable, et dans lequel il ne trouve pas sa place. Tenaillé par le désir de possession, il ne peut échapper à l’angoisse qui l’obsède. Mal dans sa peau, dans son corps, il le restera avec un sentiment poignant de l’ardeur du corps, très simplement exprimée : Une émotion naît dans le sexe, soutient l’impossible désir de se réconcilier avec tout. Le triomphe même de l’amour, dans sa victoire charnelle, apparaît comme la confirmation d’un échec. Des moments de grâce semblent apporter une accalmie : La nappe tendre des soleils est au creux de ta voix, mais un filet de vie ne permettait pas à Roger-Arnould Rivière de reconquérir l’unité perdue : Je t’ai dédié la fêlure de mon âme – mais je ne connais plus la lumière.

Le dossier central (signé par Christophe Dauphin et Michel Passelergue) des HSE 25 (2008) a été consacré à « Roger-Arnould Rivière, le poète de la cassure », avec un large choix de poèmes et la republication du recueil Masques pour une Ordalie.

À lire : Masques pour une Ordalie (Paragraphes, éd. Millas-Martin, 1953), Poésies complètes (éd. Guy Chambelland, 1963 ; réédition, 1975).

Christophe DAUPHIN

(Revue Les Hommes sans Épaules).



Publié(e) dans la revue Les Hommes sans épaules



 
Numéro Spécial GUY CHAMBELLAND POETE DE L'EMOTION n° 21

Dossier : ROGER-ARNOULD RIVIÈRE, le poète de la cassure n° 25