Miklós RADNÓTI

Miklós RADNÓTI



Poète et traducteur, assassiné à trente-cinq ans, Miklós Radnóti est une figure bouleversante de la poésie hongroise. L’œuvre qu’il laisse, pour être brève, n’en est pas moins une des plus riches et des plus denses de la première moitié du XXe siècle. « Né le 5 mai 1909, dans une famille de l’intelligentsia juive budapestoise, il évoque dans son texte en prose, Le Mois des Gémeaux, le drame qui le marque à vie de la mort à sa naissance de sa mère et de son frère jumeau. Après des études de lettres, il est écarté de l’enseignement à cause des lois antijuives. Il vit alors de leçons particulières et de travaux littéraires. On lui doit notamment des traductions des Fables de La Fontaine, de poèmes d’Apollinaire et de nombre de poètes français, allemands et anglais, mais aussi de la poésie latine, notamment Virgile. Vers la fin de la guerre, il est déporté dans une mine de cuivre en Serbie et, en novembre 1944, il est tué par les Croix Fléchées hongroises, lors du transfert du camp. On découvrira son corps en 1947 dans le charnier d’Abda, avec dans la poche de son imperméable un carnet contenant ses derniers poèmes. Publiés alors qu’il était encore étudiant, ses premiers recueils, d’inspiration bucolique (Salut païen, 1930 ; Nouveau chant des bergers, 1931), sont suivis de poèmes de plus en plus angoissés, visionnaires, abordant des thèmes tels que l’assassinat d’un poète noir ou le destin d’un ouvrier mort de la tuberculose. La montée des fascismes en Europe lui inspire « Avance, condamné » (1936) et « Chemin abrupt » (1938), où il exprime son idéal démocratique, son horreur de la guerre et de la mort. Mais c’est dans ses derniers poèmes qu’il atteint les sommets de son art avec une authenticité bouleversante et une rigueur formelle extrême » (L’O&il de la Lettre, 1995). À ce propos, son traducteur, Jean-Luc Moreau, écrit : « Ainsi donc, tandis que çà et là l’ordre totalitaire commence à accoucher du chaos, Radnóti fait succéder à l’insouciance formelle de ses premiers poèmes un vers de plus en plus structuré, de plus en plus solide et élaboré. À la montée du désordre dans le monde l’artiste répond par la montée de l’ordre dans son œuvre. À la violence qui déracine il répond en enracinant son inspiration dans la tradition la plus ancienne, la plus civilisée, la plus civile ». À lire : Marche forcée, traduit du hongrois et présenté par Jean-Luc Moreau. Paris, Phébus, 2000.



Publié(e) dans la revue Les Hommes sans épaules



 
Dossier : LES POETES DANS LA GUERRE n° 15

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