Bernard FOURNIER

Bernard FOURNIER



Poète, essayiste, critique et Secrétaire du comité de rédaction de la revue Poésie/ Première, Bernard Fournier, né le 20 septembre 1952, est Président de l’Association des Amis de Jacques Audiberti, Président du Cercle Aliénor, Secrétaire Général de l’Académie Mallarmé, animateur des rencontres le « Mercredi du poète », qui se tiennent le quatrième mercredi de chaque mois, au café François Coppée à Paris, et membre de la Société des Lettres de l’Aveyron.

Bernard Fournier a passé son enfance à Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), avant de devenir, après des études chaotiques, professeur de lettres modernes en Picardie, avec l’Agrégation en fin de carrière. Sa thèse de Doctorat porte sur l’œuvre du poète breton Eugène Guillevic.

De ses origines aveyronnaises, qui lui sont chères, Bernard Fournier nous dit : « Ma mère est née au hameau La Volte haute, commune de Pruines, arrondissement de Rodez. Orpheline de mère, elle a été élevée par son oncle monté à Paris pour faire le café-charbon, ce qu’on appelle « bougnat ». Ainsi ma mère a vécu à Paris et n’a pratiquement pas connu ni son père, frère et sœurs ; ayant peu d’instruction, elle a été réduite au rôle de mère au foyer, ce qui lui a beaucoup pesé ; elle avait rêvé d’être coiffeuse. Mon père est né au hameau de Pomiès, commune de Sénergues, arrondissement de Rodez. Après de brillantes études, il a tenu la ferme de ses parents pendant que son frère ainé était prisonnier en Allemagne ; au retour de celui-ci, il est monté à Paris et a fait une belle carrière dans la banque. Figure dominante, mon père nous a inculqué la tradition, la nostalgie et le folklore de la vie rouergats, notamment par des retours estivaux à la ferme. Cependant, il rejetait tout intellectualisation, tout tourisme, toute culture autre que la vie des champs, alors que j’étais trop jeune pour m’y intéresser et que mon père ne voulait pas nous enseigner le patois. Quant à moi, j'ai vécu en banlieue parisienne et travaillé en Picardie et n’ai repensé mes racines qu’assez tard. C’est ainsi que j’ai découvert le musée Fenaille au moment où j’écrivais sur les menhirs, comme une continuation de mes réflexions sur l’œuvre de Guillevic. Les deux départements de l’Aveyron et du Morbihan ont la particularité d’être ceux qui possèdent le plus de dolmens pour le premier et de menhirs pour le second. Ce lien préhistorique et poétique a encore de belles histoires à raconter. Fortement marqué par mon éducation, je ne suis parvenu à la culture qu’assez tard, après des études d’abord très médiocres. Je me rends tous les ans en Aveyron, où j'ai encore de la famille, à Pomiès, Montarnal, Pont-de-Salars et Saint-Côme d’Olt. »

Dans Dits de la pierre, le poète se réfère explicitement aux chefs-d’œuvre absolus que sont les statues-menhirs du musée Fenaille. Pourquoi ont-elles été élevées, ces statues-menhirs (dont la datation oscille entre 3.300 et 2.200 av. J.C.) ? Le poète nous dit : l’homme dresse cette pierre contre la peur - contre sa peur - contre les loups et les rapaces, - contre les vents et les gels - contre la folie du soleil - contre les pluies du Déluge - contre la faim - contre la soif - pour aider ses rêves. La dernière partie, « Un lieu », évoque ses attaches aveyronnaises (« là - où le ciel rejoint la terre - où l’épaule de la colline épouse le nuage - où les arbres tendent leur front à l’horizon ») : pierre - tu es l’aïeule que je n’ai pas connue - tes traits sont les miens - tu portes ma mémoire - tu es ma mémoire seule. Il s’agit d’un poème d’un seul tenant, l’une de ses plus belles réussites, épopée poétique préhistorique, avec des stations, qui évoque une tribu qui rencontre une pierre, la dresse, la grave et instaure un dialogue avec elle : peut-être la pierre a-t-elle bougé, frémi, salué - les légendes le disent - la terre a tremblé - la mer s’est soulevée - les vents ont soufflé - la pierre est venue d’elle-même - fantôme des royaumes inférieurs - elle a marché, droite, vers ce lieu.

Christophe DAUPHIN

(Revue Les Hommes sans Epaules).

À lire, Poésie : Marches (Librairie Galerie Racine, 2005), Marches II (Le Manuscrit, 2008), Promesses (Encres vives, 2010), Maison des ombres (L’Harmattan, 2010), Marches III (Aspect, 2011), Une pierre, en chemin (Tensing, 2013), .Lire les rivières, précédé de La Rivière des parfums (Aspect, 2017), Hémon, suivi d’Antigone, Silences, Loin la langue (La Feuille de thé, 2019), Vigiles des villages (Prix Troubadours de la revue Friches, 2020), Dits de la Pierre (La Feuille de thé 2022, Prix Louise-Labé 2023).

Essais : Modernité de Guillevic (Presses Universitaires du Septentrion, 1998), Le Cri du chat-huant, le lyrisme chez Guillevic (L’Harmattan, 2002), L’Imaginaire dans la poésie de Marc Alyn (L’Harmattan, 2004), Métamorphoses d’Audiberti, une biographie, 1899-1965 (Le Petit pavé, 2020), Histoire de l’Académie Mallarmé 1913-1993 (Le Petit Pavé, 2016), Audiberti et le cinéma (Quidam 2023).

Romans : Privé du sonnet (Les Amis du Vieux Villeneuve-sur-Yonne, 2017), Un amour de Bussy (Les Amis du Vieux Villeneuve-sur-Yonne, 2022).

 

Poème

 

Un éclair brise la poitrine

Met le feu

Electrise les nerfs

 

Et le bois

De la tête

S’enfonce dans la poitrine

Écarte le cœur

 

Le corps est foudroyé

Séparé

 

S’ouvre

S’envole la mémoire

Fusillée

 

Un ressort s’est brisé

 

L’éclair a fait un bruit

Tel que l’horizon

S’en fut tout enflammé

Le monde s’embrasa

De la table rase des incendies

Bernard Fournier

 



Publié(e) dans la revue Les Hommes sans épaules




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